MAISON DE MICHEL-ANGE.
191
est lui-même et à lui seul comme une autre puis¬
sance. On voit dans cette maison ses premiers
ouvrages de peinture et de sculpture. Une esquisse
de la Vierge allaitant l’Enfant Jésus, est extraor¬
dinaire par la vigueur et l’avidité du nourrisson;
un Christ en croix, au crayon rouge, expressif, a
un fini d’exécution qui surprend lorsqu’on se rap¬
pelle l’impatient talent de l’artiste. Michel-Ange
peignait de la main gauche, comme Holbein, et il
sculptait de la droite. La nécessité l’avait contraint
à prendre ce parti; le maniement des marbres avait
tellement affaibli sa main droite, qu’il fut obligé
de colorier de la gauche. Quant à la question de
savoir dans lequel des deux arts il excella davan¬
tage, elle semble assez incertaine : Cicognara et
d’autres écrivains le regardent comme plus grand
peintre; M. Quatremère paraît d’un avis contraire.
A défaut de science, on ne peut parler que de ses
impressions, et j’avoue que la chapelle des tom¬
beaux m’en a causé une bien plus vive que le Ju¬
gement dernier, fort altéré, il est vrai, par le temps.
Lorsqu’on se rappelle encore le dôme de Saint¬
Pierre et ses poésies si passionnées, si religieuses,
si énergiques, si dantesques comme son talent,
il paraît véritablement selon la belle expression
du poëte : l’homme aux quatre âmes, l’ uom di
quattr’ alme (1). Le précieux manuscrit autographe
des poésies de Michel-Ange, conservé dans sa mai¬
son, se compose des pièces qu’il envoyait aux frères
del Riccio, ses amis, afin de les corriger. Ce ma¬
nuscrit, peu connu et peu communique, est extrê¬
(1) Pindemonte. Il merito vero; Sermone.