Full text: Tome second (2)

NOTES DU LIVRE X. 
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lèrent d'autant plus la marche qu’elles s'avancent davantage 
vers la mer. Philander et Perrault ne partagent point cette opi¬ 
nion. Bien que les rames de la galère qu’elles font remuer, dit 
Perrault, soient en quelque façon un levier renversé à qui la mer 
sert comme d’appui, il n’est pas vrai néanmoins que la longueur 
des rames, depuis la cheville où elles sont attachées jusqu’à la 
mer, serve à les faire agir avec plus de force par la raison du 
levier : car par la raison du levier, le contraire devrait arriver. 
parce que plus est longue la partie du levier qui est depuis l'appui 
jusqu’à la puissance qui remue, plus elle a de force. Aristote donne 
la véritable raison de l’effet de cette longueur de la rame, savoir. 
que cette longueur est nécessaire, afin que l'eau étant frappée 
avec plus de vitesse, comme elle l'est plus la rame est longue, 
l'eau résiste davantage : car si l'eau n obéissait point, il est cer¬ 
tain que plus la rame serait courte depuis la cheville jusqu’à la 
mer, et plus les rameurs auraient de force pour remuer le vais¬ 
seau, et, en ce cas, il vaudrait mieux, pour remuer le vaisseau 
avec plus de puissance, que la plus grande longueur de la rame 
fut depuis la cheville jusqu'à la main des rameurs. Mais Galiani 
prétend que ces critiques n'ont pas saisi le sens de Vitruve, et 
qu'ils appliquent ici fort mal à propos l'autorité d'Aristote. C'est 
un axiome en physique, dit-il, que la réaction est égale à l'ac 
tion, tellement que quand deux puissances agissent en sens con¬ 
traire aux deux extrémités d'un levier, elles peuvent être consi¬ 
dérées indifféremment, l'une ou l'autre, comme la force motrice, 
ou comme le corps résistant. Or, Vitruve dit que quand la plus 
petite partie de la rame est depuis la main du rameur jusqu'à la 
cheville, et la plus grande depuis la cheville jusqu'à la mer, le 
mouvement du vaisseau est plus prompt. Ces critiques préten¬ 
dent, au contraire, qu’on le ferait agir plus aisément, si la par¬ 
tie de la rame était plus longue depuis la main du rameur jusqu'à 
la cheville, que celle qui est depuis la cheville jusqu'à la mer. 
Dans ce sens, ils ont raison de dire qu'il est plus aisé de le faire 
agir, c'est-à-dire que les rameurs n'ont pas besoin d'y employer 
autant de force. Mais ce n'est pas ce que Vitruve a entendu : il a 
dit que le vaisseau irait plus vite. En supposant donc, comme le 
fait Vitruve, que la quantité des rameurs soit suffisante pour 
vaincre la force opposée, c'est-à-dire le poids du navire et la ré¬ 
sistance de l’eau, tout homme de bon sens sentira, sans être mé¬ 
canicien, que plus la rame sera longue depuis la cheville jusqu’à 
la mer, plus long sera le trajet que chaque coup de rame fera faire 
au navire.
	        
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