LIVRE VII, CHAP. XIII.
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REMARQUES.
LES anciens préparoient la ceruse et le vert-de-gris, comme nous les préparons encore aujour¬
d'hui. Vitruve appelle cette dernière couleur, œrugine, c'est-à-dire rouille de cuivre. Il ajoute :
nous l'appelons eruca : je ne sais pourquoi il lui donne ces deux noms qui se ressemblent si
fort. C'étoit sans doute pour abréger, que les peintres de Rome disoient eruça au lieu d'œrugine,
car il n'est pas probable, qu'on auroit donné au vert- de-gris, le nom d'eruca qui signifie une
chenille , parce que cette couleur ressemble beaucoup à celle de la chenille verte qui est la plus
commune de toutes.
La fin de ce chapitre nous prouve clairement, que la couleur connue des anciens, sous le nom
de sandaraque, étoit vraiment celle que nous nommons aujourd'hui minium, comme je l'ai ob¬
servé dans mes remarques sur les chapitres précédents.
CHAPITRE XIII.
De la Couleur Pourpre.
Nous parlerons présentement de la pourpre, la couleur par excellence, la plus
précieuse et la plus belle de toutes celles qui existent ; on la tire d'un coquillage
marin, qu'on regarde lui-même comme une production des plus admirables de
la nature : en effet , la teinture pourpre qu'on en tire, n'est pas la même par¬
tout ; ses teintes varient à mesure que les climats qui la produisent sont plus ou
moins éloignés du cours du soleil. Celle qui vient du royaume de Pont, et de
la Gaule, est très-foncée, et presque noire, parce que ces contrées s'approchent du
septentrion ; celle qui vient des pays qui sont entre le couchant et le septentrion,
est pâle; mais vers l'orient, et l'occident équinoxial, elle tire sur le violet ; enfin elle
est parfaitement rouge dans les pays méridionaux. L'isle de Rhodes en produit cepen
dant qui est aussi rouge que celle qui vient des régions les plus rapprochées de la
ligne.
Quand on a recueilli une certaine quantité de ces coquillages, on les coupe tout
autour avec un couteau , pour faire écouler la liqueur pourprée qu'ils contien¬
nent ; on achève de l'exprimer en les pilant dans des mortiers. Cette teinture s'ap¬
pelle ostrum , parce qu'en effet on la tire des huitres qu'on trouve dans la mer.
Elle a le défaut de se dessécher aisément , à cause de la quantité de sel qu'elle
contient ; mais on obvie à cet inconvénient en la mêlant avec du miel.
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