LARCHITECTURE DE VITRUVE.
pions; () les chapiteaux de ces machines sont, à cet effet, percés à droite et à gauche
de deux trous, qui rendent un même ton, et par lesquels passent les cables, faits de
cordes de nerfs, que l'on bande avec des cabestans, moulinets ou vindas et leviers, et
qu'on ne doit arrêter pour décocher la machine, qu'autant qu'elles rendent l'un et l'autre
des sons qui forment un accord parfait lorsqu'on les touche ; par ce moyen, il juge si les
bras de la machine sont également tendus pour frapper en même-temps leur coup; car
si elles ne rendoient pas un même son, le trait seroit dérangé dans sa direction. La musi¬
que lui sert encore à disposer les vases d'airain (2) qu'on place dans les cases sous les de¬
grés des théâtres, par proportions mathématiqués, et d'après les différens sons qu'ils ren¬
dent, que les Grecs appellent Tons. La grandeur de ces vases est réglée d'après les divers
accords de la musique; on les dispose circulairement le long des degrés, de manière qu'ils
passent de la quarte à la quinte, à l'octave, etc.; la voix des acteurs qui part de la scène,
retentit contre ces vases qui se correspondent, et par là elle s'accroît et parvient plus douce
et en même-temps plus sonore aux oreilles des spectateurs. Enfin personne ne pourroit
construire les machines hydrauliques et autres semblables, sans le secours de la musi-
que (3).
L'étude de la médecine lui est nécessaire pour connoître les aspects du ciel, (que
les Grecs nomment climats) () distinguer les lieux sains et dangereux, et quelles
sont les diverses propriétés des eaux. Il n'est pas possible de bâtir une habitation, qui
soit saine, si l'on n'a bien examiné toutes ces choses. Il faut qu'il connoisse la juris
prudence et les lois pour diriger la construction des murs communs, (5) les gouttières
et les égoûts ; pour placer les fenêtres; pour l'écoulement des eaux et choses semblables.
Avant de commencer un édifice, il doit prévenir tous les procès qu'on pourroit intenter
au propriétaire, lorsque l'ouvrage sera achevé; cette connoissance lui est aussi nêces
saire, pour bien rédiger les baux de location, tant à l'avantage du locataire que du ren-
deur, et n'y laisser échapper aucun terme ambigu, afin d'éviter toute espèce de chicane
qui pourroit s'élever entr'eux. L'astronomie (6) lui sert pour la confection des cadrans
(5) Par murs communs, Vitruve n'entend pas, com¬
() Vitruve parle plus amplement de ces machines
me l'a cru Perrault, les murs mitoyens, mais les murs
Liv. X, Ch. 15, 16, 17 et 18.
des maisons le long des rues, dont la construction étoit
(2) Vitruve parle de la distribution de ces vases, de
réglée à Rome par des lois particulières, comme on le
l'harmonie et des théâtres Liv. V. Ch. 3,4, 5, 6, 7 et 8.
verra plus loin
(3) Tout le dixième livre est employé à traiter de
(6) Vitruve se sert du mot Astrologie que nous avons
ces machines, tant de celles hydrauliques que de celles
abandonné aux charlatans, pour désigner l'influence qu'ils
de la guerre.
prétendent que les astres ont sur le corps humain ; et je
(4) Ce mot est dérivé du verbe o, incliné, parce
que les divers degrés du méridien sont inclinés vers le
me suis servi de celui d'astronomie, qui désigne la con¬
pôle, ou déclinent vers l'équateur.
noissance de l'état des cieux et du mouvement des astres.