LIVRE VI, JOHAP. y.
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Les salons égyptiens, dont il est parlé dans ce chapitre, ressemblent beaucoup à ce que nous
appelons une chambre italienne. L'essentiel de ce genre d'édifice consiste à ne prendre le jour que
d'en haut , et à avoir l'exhaussement de deux étages; ce qui procure trois grands avantages : le pré¬
mier, c'est que cette pièce peut être dégagée des quatre côtés, et répondre à quatre appartemens ;
le second, qu'on y respire un air très-frais en été ; le troisième, que le jour qui vient des quatre
côtés, et par en haut, n'éblouit pas autant, et laisse, tout à l'entour, l'espace vuide pour y placér
des tableaux et autres ornemens dont on le veut décorer : espace qui est ordinairement occupé en
grande partie par les fenêtres.
Nous voyons clairement, dans ce chapitre, comme nous l'avons déjà observé dans nos remarques
sur le 1." Chap. du III.me Liv., qu'entre deux ordres de colonnes, les anciehs supprimoient quel
quefois la frise et la corniche , n'y mettant que la seule architrave.
Quoiqu'on voie fort peu d'exemples de cette manière , dans les édifices anciens qui subsisient
encore, on peut dire néanmoins qu'elle est appuyée sur la raison, qui veut que les ornemens
d'architecture soient fondés sur quelqu'usage. L'usage des corniches étant de défendre les murs et
les colonnes des injures du temps, elles sont inutiles dans les lieux qui sont couverts; elles seroient
même nuisibles dans un appartement tel que le salon égyptien décrit dans ce chapitre, où elles ne
feroient qu'intercepter le jour d’en haut, le seul qu’elle puisse recevoir. Je suis donc persuadé
avec Perrault et Galiani, que , malgré que le mot epistylium signifie par fois tout l'entablement,
ici il ne signifie autre chose que l'architrave. On peut encore ajouter, en faveur de cette opinion
comme l'observe Galiani, que l'auteur s'est servi, un peu auparavant, de ces expressions, en par¬
lant des salons corinthiens; mais là, après le mot epistylia, il ajoute celui de coronas supraque
habeant epistylia , coronas ; s'il avoit aussi voulu avoir la même chose au-dessus du premier ordre
de colonnes du salon égyptien, en en parlant, il n'auroit pas négligé de citer la corniche. Perrault
à cette occasion ; rapporte l'exemple d'un ancien édifice qui existoit encore de son temps, auprès
de Bordeaux, nommé les Tuteles , dont il donne la figure ; elle représente une colonnade d'ordre
corinthien, au-dessus de laquelle règne un attique ; entre l'attique et les chapiteaux des colonnes,
ilny a que l’architrave. Cet édifice ancien, l'un des plus beaux qui nous étoient restés des Romains,
en deça des Alpes, a été détruit, comme nous l'avons dit, vers l'an 1680 , lorsqu'on a construit
les nouvelles fortifications
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