LIIVRE V,CUAP. XIIO
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ou par des tympans, (1) on vuidera l'eau qui est entre ces deux digues ; cet espace
étant desséché, on creusera le fondement jusqu'au solide, si c'est de la terre, et on
les bâtira de libage, joint avec de la chaux et du sable, les faisant plus larges que
le mur qu'ils doivent porter. Si le lieu n'est pas ferme, on y enfoncera des pilotis
de bois d'aune demi-brûlé, ou d'olivier ou de chêne, dont les intervalles seront
remplis de charbons, comme on l'a dit en parlant des fondemens des théâtres et
des autres murailles. Là dessus, on élevera le mur de pierres de taille ; celles qu'on
posera en boutisse, seront les plus longues qu'il sera possible , afin que celles qui
sont entre les boutisses soient plus fermement liées : on emplira le dedans du mui
avec du mortier et du moellon ou en maçonnerie; ce qui formera une masse assez
solide pour soutenir même une tour, si on la bâtissoit dessus. Quand on aura achevé
tout cela, il faut observer, en bâtissant les arsenaux pour les navires, de les tourner
vers le septentrion : car la chaleur qu'occasionne l'aspect du midi, engendre et en-
tretient les vers et autres insectes qui carient le bois ; sur-tout il ne faut pas les cou¬
vrir de bois, crainte d'incendie. On ne peut guère déterminer leur grandeur; mais
il faut qu'ils soient capables de contenir au large les plus grands vaisseaux et qu'on
puisse les y faire entrer facilement.
J'ai traité, dans ce livre, de tout ce qui m'a paru le plus nécessaire et le plus
utile pour perfectionner la construction des édifices publics dans les villes. Dans le
suivant, je traiterai de l'utilité et des proportions des bâtimens que font construire les
particuliers pour leur usage.
REMARQUES
Nous ne pouvons pas comparer les ports de mer des anciens avec les nôtres. Pour bien com¬
prendre ce que dit Vitruve de leur construction , il faut se reporiter aux temps où il écrivoit.
Nayant point alors de boussole, on ne pouvoit guère naviguer que sur les côtes ; aussi ne se
servoit-on que de petits bâtimens plats et à rames, qui n'avoient besoin que de très-peu de pro¬
fondeur ; presque toutes les rades étoient pour eux des ports : et lorsqu'ils n'en trouvoient pas de
naturels dans les lieux où ils avoient besoin d'en avoir, ils en formoient bientôt au moyen d'une
simple jetée ou mole. Ainsi dans ce chapitre, qui a pour objet les poris de mer des anciens
Vitruve ne parle que de la construction de ces moles ; de celle des arsenaux pour y construire
les navires, et même pour les y enfermer, puisqu'ils étoient assez légers pour pouvoir être tirés
à terre à volonté. Il ajoute qu'ils étoient entourés de portiques, qu'il y avoit des pasagés pour se
rendre au marché, et qu'on élevoit des tours, d'où on tendoit des chaînes pour les fermer du
côté de la mer.
(») Il décrit ces machines dans les gene, 11.me et 12.ne Chap. du X.me Liv.