DU TRADUCTEUR.
épuisées, et ce n'est qu'avec la plus grande peine qu'un artiste ou un amateur parvient
à s'en procurer un exemplaire. On a lieu de s'étonner que personne n'ait pensé jus¬
qu'à présent à donner au public une nouvelle édition du seul.livre de l'antiquité qui
traite d'une science que nous devons entièrement aux anciens , que nous avons
apprise d'eux, et dans laquelle nous ne pouvons réussir qu'en les imitant, qu'en
marchant sur leurs traces.
Depuis l'époque où l'on a vu renaître en France le goût des lettres et des arts,
on s'est empressé de publier de nouvelles éditions des auteurs grecs et latins. Les
poêtes, les orateurs, les historiens ont été traduits, commentés plusieurs fois, et le
sont encore tous les jours. Mais ce qu'ils ont écrit sur les sciences et les arts ne
nous est pas aussi connu ; peu d'ouvrages de ce genre sont parvenus jusqu'à nous.
Il existe cependant une belle traduction des ouvrages de Pline, (*) qu'on peut re¬
garder comme l'encyclopédie des anciens; c'est en effet le recueil de toutes leurs con
noissances, tant dans les sciences que dans les arts. Nous avons aussi une traduction
de Strabon, une de Frontin et de Végèce. Mais les lumières que nous avons acquises
depuis tant de siècles, nous ont rendus bien plus habiles que les anciens. Ce qu'ils
ont écrit sur ces matières ne peut guère servir qu'à contenter notre curiosité, en
nous faisant voir jusqu'à quel point ils avoient porté les sciences.
Il n'en est pas de même de l'architecture: cet art, comme nous l'avons dit, nous
est venu des anciens dans toute sa pureté, dans sa dernière perfection; c'est en vain que
nous prétendrions les surpasser en nous écartant de leurs principes: nous devons
les suivre, nous devons imiter leurs ouvrages sous peine de choquer le bon sens et
le goût. En reconnoissant cette vérité incontestable, n'est-il donc pas bien étonnant
que le seul traité d'architecture que les anciens nous ont laissé, soit prèsqu'oublié
parmi nous? La traduction françoise de Perrault a été imprimée la dernière fois en
1684 Depuis ce temps, il n'a plus paru en France aucune édition de Vitruve; et ce-
pendant le goût des beaux-arts, et sur-tout de l'architecture, a toujours augmenté depuis
(*) Cette traduction est de M. Poinsinet de Sivry ; elle est imprimée en 18 vol. in-4.e