VITRUVE. LIV. II.
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plus d'un pied et demi d'épaisseur, et les autres, pour
qu'il y ait moins d'espace de perdu, ne doivent pas être
plus épais. Or, de telles murailles ne peuvent pas sup¬
porter plus d'un étage; autrement il importerait qu'elles
eussent dans leur épaisseur deux ou trois rangs de bri¬
ques. Et dans une ville aussi majestueuse et aussi peu¬
plée, il eût fallu un développement immense d'habita¬
tions. Aussi, comme l'espace que comprend l'enceinte de
la ville n'est point assez vaste pour loger une si grande
multitude, force a été d'avoir recours à la hauteur des
édifices. Et, grâce au mélange d'assises de pierres, de
chaînes de briques, de rangées de moellon, les murs ont
pu atteindre une grande élévation; les étages se sont
assis les uns sur les autres, et les avantages se sont mul¬
tipliés en raison de l'augmentation du nombre des loge¬
ments. Les murs ayant donc, par la superposition des
étages, pris un grand développement en hauteur, le peu-
ple romain s'est créé de belles habitations sans difficulté.
Après avoir expliqué comment dans Rome le peu
d'espace a fait bannir l'usage de la brique pour la con¬
struction des murs, je vais marquer pour le cas où on
l'emploierait hors de la ville, le moyen de la faire durer
longtemps sans réparation. Sur le haut des murs, au-des¬
sous du toit, il faut construire avec des tuiles une bor¬
dure d'un pied et demi de hauteur, et lui donner la saillie
d'une corniche : par ce moyen on pourra éviter les acci¬
dents qu'ils éprouvent ordinairement. En effet, la cou¬
verture venant à perdre des tuiles, brisées ou emportées
par le vent, la pluie ne manque pas de se répandre par
là sur les flancs de la muraille; mais l'entablement dont
nous venons de parler empêchera qu'elle ne soit endom-
magée : la saillie de la corniche rejettera loin de son
parement toutes les gouttes d'eau qui tomberont, et de
cette manière la garantira, sans qu'elle perde rien de sa
solidité.