LIVRE X, CHAP. XV.
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figures qui sont dans le livre anonyme, intitulé Notitia imperi, celle que G. du Choul dit avoir
trée d'un ancien marbre, la catapulte qui se voit dans l'arsenal de Constantinople, celle qui se
voyoit dans celui de Bruxelles, ni celles qui sont représentées sur la colonne Trajane , n'ont aucun
rapport avec celle dont Vitruve nous donne les proportions. Cet auteur auroit obligé davantage la
postérité , si , au lieu de ces proportions, il eût expliqué et décrit quelle étoit la figure et quels
étoient les usages des parties dont il donne si exactement les dimensions. Mais il est très-difficile,
d'après ce qu'il dit, de comprendre quelle étoit la structure de cette machine,
On sait en général que les catapultes étoient faites pour jeter des javelots, de même que les
balistes servoient à jeter des pierres, quoique les derniers auteurs latins n'aient jamais fait cetle
distinction. Ils ont toujours employé le mot baliste pour exprimer l'une et l'autre machine. Les
catapultes lançoient leurs javelots avec une si grande force, qu’au rapport de Luçain ils perçoient
plusieurs hommes les uns après les autres. Suivant l'auteur du livre intitulé Notitia imperii, elles
portoient d'un bord du Danube à l'autre ; il y en avoit enfin qui poussoient des javelots de la
grosseur de nos chevrons. Athénée en décrit qui avoient douze coudées; il ajoute, et on aura
peine à le croire, qu'Agésistrate avoit fait une catapulte qui n'avoit que trois palmes de long , et
portoit cependant au delà de trois stades, c'est-à-dire environ 300 toises.
La description de Vitruve fait entendre que la catapulte avoit deux bras ou arbres, c'est-à-dire,
des pièces de bois qu'on faisoit plier en les attirant avec des cordes qu'on bandoit par des mou¬
linets; mais personne n'a expliqué comment ces bras frappoient le javelot, comment ils étoient ar¬
rêtés avant la détente, et comment la détente se faisoit , ni à quoi servoit cette égalité de tension
qu'on connoissoit par l'égalité des tons que les cordes rendoient; on ne sait point non plus quel étoit
le mystère de toutes ces proportions qu'on prenoit sur les trous par lesquels pasoient les cables.
Les monuments antiques nous offrent deux sortes de catapultes; dans les unes ce sont les bras
qui se plient comme ceux d'une arbalète, en tirant une corde qui va de l'un à l'autre pour lancer
le trait; quand on la lâchoit, les bras se redressant faisoient partir le dard. On sent que pour tirer à
soi cette corde, il falloit que l'art vint au secours des forces humaines et qu'on employât un moulinet.
Dans les autres catapultes ce sont les bras ou arbres qui frappoient immédiatement le javelot, et
il paroît que la catapulte, dont parle Vitruve, agissoit de cette manière. Les deux bras de cette cata¬
pulte étoient deux arbres placés debout à côté l'un de l'autre, et arrêtés au bas de la machine
comme le mât d'un navire. Leurs deux bouts d'en haut se rapportoient aux trous du chapiteau,
quand on les tiroit avec des cables qui passoient par ces trous ; lorsqu'on les détendoit, ils
frappoient d’un même coup le javelot. On mettoit deux arbres pour augmenter l'esfet de la machi¬
ne. On observoit si les cordes rendoient le même ton , pour s'assurer si les deux arbres étoient
tendus également, ce qui étoit nécessaire , autrement le bras qu'on auroit moins tendu n'auroit servi
à rien , parce que l'autre auroit déjà poussé le javelot avant qu'il le pût toucher.
Nous avons interprété comme Galiani les signes qui indiquent, dans le texte latin, les différentes
grandeurs des parties de la catapulte et de la baliste.
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