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L'ARCHITECTURE DE VITRUVE.
parce qu'une chaleur douce attire toujours à elle l'humidité. On peut encore faire
cette autre expérience: on allume un grand feu; si après avoir beaucoup échauffé
la terre, il s'élève une vapeur épaisse, c'est un signe qu'il y a de l'eau.
Quand on aura fait toutes ces épreuves, et qu'on aura découvert, au moyen des
signes que nous venons d'indiquer, un endroit où il doit y avoir de l'eau, on y
creusera un puits: si l'on y trouve une source, il faudra faire plusieurs autres puits
alentour , et les joindre ensemble par des conduits souterrains. Il faut observer que
c'est principalement sur la pente des montagnes, qui regardent le septentrion, qu'il
faut chercher les eaux: c'est là où l'on trouve les meilleures, où elles sont les plus
saines et les plus abondantes; puisqu'à l'abri du soleil, couverte d'arbres fort épais,
la pente de la montagne se fait ombre à elle même; les rayons de cet astre, qu'elle
ne reçoit qu'obliquement, ne peuvent y dessécher la terre. Nous voyons en effet
l'eau de pluies s'amasser dans les creux qui sont au haut des montagnes. Les arbres
qui y croissent en grand nombre, y conservent la neige fort long-temps; elle fond
peu à peu, s'écoule insensiblement par les veines de la terre. Cette eau parvenue
au pied des montagnes y produit des fontaines.
Tandis qu'au contraire, les sources qui sortent dans les campagnes ne peuvent
donner beaucoup d'eau, et quand elles en donneroient en abondance, elle seroit
toujours mauvaise, parce qu'aucun ombrage n'empêche les rayons du soleil d'échauffer
ces plaines qu'ils dessêchent entièrement, ou du moins en tirent les parties les plus
légères, les plus pures, et les plus salubres, qui se dissipent dans les vastes régions
de l'air, et laissent, à ces fontaines de campagne, les parties les plus pesantes, les
plus crues, et les plus désagréables.
REMARQUES.
PLINE dans le 27.' Chap. de son XXXI." Livre , indique les mêmes moyens que Vitruve, pour
découvrir les fontaines souterraines : et Palladio, dans le 80.e Chap. de son IX.e Liv., les indique
également. Ces deux auteurs traitent amplement de cette matière ; ils peuvent servir à interpréter
plusieurs passages de ce chapitre de Vitruve