LIVRE V, CHAP. X.
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Tous ceux qui ont figuré ces bains avant moi, du moins que je sache, ont représenté la baignoire
enfoncée au milieu du pavé, de manière que pour y descendre, ils ont placé quatre petits escaliers
dans les coins.
Au contraire dans la peinture trouvée dans les thermes de Titus, la baignoire forme une cuve élevée
au-dessus du pavé ; par-dessous se trouve l'hypocauste qui entretient une chaleur douce dans la
place , afin que ceux qui entrent ou sortent du bain , n'éprouvent aucun froid. J'ai vu , à Rome,
plusieurs de ces baignoires qui avoient été tirées hors des anciens thermes ; il s'en trouve deux entre
autres , formées chacune d'un seul morceau de granit d'Egypte, qui servent présentement de bassin
aux deux fontaines qui sont sur la place Farnèse ; elles ont 17 pieds 4 pouces de longueur et 4
pieds deux pouces de profondeur ; elles sont ovales et ressemblent à celle qui est représentée dans
la peinture que je viens de citer. Je ne veux pas dire par-là que les baignoires des anciens étoient
toutes formées d'une seule pierre, et qu'elles n'étoient pas plus grandes que celles-ci, qui ne seroient
certainement pas suffisantes pour un bain public, comme celui dont il s'agit , qui devoit être très
spacieux, puisque Vitruve veut qu'il soit proportionné au nombre des habitans; et d'ailleurs on sait
qu'il y avoit des bains si grands qu'on y pouvoit nager, et qu'on nommoit pour cette raison colymbe¬
thrœ. Mais je dis que ces bains, si spacieux qu'ils fussent, étoient toujours élevés, comme celui que
représente la peinture que j'ai citée ; soit qu'ils fussent faits de bois ou maçonnés.
Pour faire comprendre présentement qu'elle étoit la construction de la salle où l'on prenoit les
bains, ainsi que les expressions dont Vitruve se sert pour désigner les différentes parties qui la com¬
posoient , je remarquerai d'abord que c'est à cette salle qu'il donne particulièrement le nom de bal¬
neum ; tandis qu’il appelle les autres, l'une tepidarium, frigidarium, etc. ; il dit que sa longueur,
non compris le reposoir qui est autour de la baignoire et de la loge prœter scalam labri et alvei
doit avoir un tiers moins que sa longueur ; du moins c'est ainsi que j'ai interprété ce passage, parce
que je crois , avec tous les autres interprètes , que labrum signifie les bords de la baignoire qui
contenoit l'eau pour s'y laver ; elle est indiquée fig. a dans la XV.e planche.
Que schola tiré du mot grec exedi signisie, comme dans cette langue, un lieu où l'on demeure
sans agir et sans travailler du corps, et qui étoit l'endroit dans les bains où ceux qui vouloient se
baigner , attendoient qu'il y eût place dans l'eau ; je l'ai rendu comme Perrault par le mot repo¬
soir, en supposant, d'après la peinture des thermes de Titus, que c'étoit des espèces de gradins
et d'après les expressions de Vitruve , qu'ils s'étendoient autour de la baignoire et de la loge. J'ai
indiqué ces gradins C. C. fig. citée. Je n'ai pas cru qu'alveus vouloit dire ici autre chose qu'une
loge ou une niche, suivant sa vraie signification ; parce que dans la peinture des thermes de Titus
on voit, en efset, plusieurs loges ou niches, dans les salles destinées aux bains : c'étoit sans doute
là où l'on alloit se déshabiller ; il régnoit autour un reposoir ou banc, schola, sur lequel étoit un
coussin avec un degré par-dessous ; par-devant, étoit une espèce de cloison, pluteum , faite dans le
genre de celles que j'ai indiquées, en interprétant le mot pluteum dans mes remarques , à la fin
du premier chapitre de ce livre ; cette loge est marquée (dd) dans la figure (e).