L'ARCHITECTURE DE VITRUVE.
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REMARQUES.
LEs théâtres des anciens étant découverts, on élevoit, par derrière, des portiques, où le peuple
pouvait se mettre à l’abri, quand il survenoit des pluies pendant les jeux. Le milieu de ces por¬
tiques étoit occupé par une plantation d’arbres, qui servoit de promenade en tout temps, et où lon
se réunissoit sur-tout, en attendant le spectacle,
Le desin que Perrault donne de ces portiques et promenoirs, diffère beaucoup de celui qu'en
donne Galiani et que nous avons adopté. Dans le plan de Perrault, le double portique de colonnes
se trouve placé en dehors d’un mur qui les sépare des allées d’arbres qui forment le promenoir; au
contraire dans le nôtre, le mur est en dehors, et il renferme les portiques et les promenoirs. Voici
les raisons qui ont fait adopter ce plan à Galiani : l'auteur s'esprime ainsi : parietes qui circumelu¬
dant portious ambulationes. Sil avoit voulu s'exprimer dans le sens que lui prête Perrault, il auroit
dit, hypathras ambulationes, d'autant plus qu’il dit un peu après, media vero spatia quae erunt
sub divo inter porticus : il dit inter porticus, tandis que, pour parler dans le sens de Perrault, il
auroit dû dire inter parietes.
Perrault avant placé ce mur dans l'intérieur, a dû changer plusieurs choses dans la suite du texte
pour le metre d'accord avec son plan. En plaçant ce mur à l’extérieur, comme Galiani et nous
l'avons fait, tous ces changemens deviennent inutiles ; le reste du texte est parfaitement d'accord avec
le nôtre.
Ces portiques, comme on l'a vu, formoient un genre d'édifice différent des autres; quelques¬
unes de ses dimensions, il est vrai, étoient réglées sur celles des temples ; mais la plupart l'étolent
par des régles particulères, comme l'observe Vitruve. De toutes ces particularités , la plus remar¬
quable étoit cet assemblage de colonnes de différens ordres dans le même portique ; à droite, il
en avoit de doriques, à gauche dioniques ou corinthiennes ; les unes étoient plus hautes, les autres
plus basses. Nous voyons, dans le texte, que les colonnes ioniques ou corinthiennes de l’intérieur,
doivent être plus hautes, d’une cinquième partie, que les colonnes doriques de l'extérieur. Cette
différence d'une cinquième partie donneroit, aux colonnes de l’intérieur, une hauteur excesive en
comparaison des autres ; d'est pourquoi Perrault a raison de dire qu’il faut lire XV au lieu de V
ce qui au lieu d’une cinquième partie feroit seulement la quinzième ; et qu'on doit croire que, du
nombre quinze, le caractère X étoit efsacé dans la copie, et qu’il n'étoit resté que le V.
Vitruve cite dans ce chapitre les principaux portiques de la Grèce ; il parle entre autres de l'Odeon
que Périclés fit bâtir à Athènes : c'étoit là où on disputoit des prix de musique, d'où lui vient son
nom dérivé du grec éàj qui signifie chanson. Plutarque fait la description de cet édifice : le dedans,
dit-il, étoit occupé par plusieurs rangs de sièges ou gradins, et porté par, une infinité de colonnes,
mais la couverture étoit un seul comble rond, qui se courboit tout autour, et se terminoit en
pointe. On dit, ajoute-t-il, que la tente ou pavillon du roi Xercés lui servit de modele. Il rapporte
ensuite la plaisanterie que le poète Cratinus fait de Périclès dans sa comédie des Thraciens, ou se
moquant de la tête de ce grand personnage, qui étoit pointue, il dit qu’elle fut le modèle sur
lequel il fit construire la coupole de l'Odéon,