CHAP. XI.
VITRUVE
CHAPITRE XI.
De la Limace avec laquelle on peut élever beaucoup dequ,
mais non pas bien haut.
TLya une maniere de Limace qui puise beaucoup d'eau, mais qui ne l'éleve pas si haut?
que la roue: Elle se fait ainsi. On prend une piece de bois? qui a autant de doits d'é¬
paisseur qu'elle a de pieds de long. Aprés l'avoir bien arondie on divise le cercle qui est,
chaque bout, en quatre parties egales ou en huit, & par ces divisions on trace autant de
lignes, en sorte que la piece de bois estant levée debout, les extremitez de toutes les li
gnes se répondent à plomb. De ces extremitez on tire tout le long de la piece de hois
d' autres lignes distantes l'une de l'autre de la huitieme partie de la circonference de la pie¬ u
ce de bois. Aprés cela on marque tout le long de l'une de ces lignes des espaces égauxà
ceux de leur distance l'une de l'autre, & avant tirem par les extremitez de ces espaces des li¬
gnes qui traversent toutes celles qui sont selon la longueur, on marque des points aux en¬
droits où les lignes s'entrecroisent. Cela estant ainsi fait avec exactitude, on prendune
petite tringle de bois de saule ou: d'ozier, laquelle estant frottée de poix liquide est appli¬
quée sur le premier point, & ensuite allant obliquement, est conduite sur tous les autres
points que les lignes traversantes marquent dans celles qui sont selon la longueur; & ainsi
en tournant, après avoir traverse les huit distances, & passe par les huit points qui sont se¬
lon la longueur, on va jusqu’à la mesme ligne par laquelle on avoit commencé,? De la
mesme maniere on attache d'autres tringles obliquement, sur toutes les autres interse¬
ctions qui sont faites ensuite jusqu'au bout par les lignes droites & traversantes, & sui¬
vant la division qui a estè faite en huit parties, on forme des canaux entortillez & tout à¬
fait semblables à ceux que l'on voit dans les coquilles des limaçons. Sur les premieres trin¬
gles qui servent comme de fondement, on en applique d'autres frottées aussi de poix li¬
quide, jusqu à ce qu’ estant assises les unes sur les autres, elles fassent que la grosseur de la
limace soint tout au plus la huitième partie de sa longueur. Au tour des circonvolutions des
tringles, on attache des ais que l'on frotte encore de poix liquide, & que l'on bande aussi
avec du fer, afin que la pesanteur de l'eau ne rompe rien. Les deux bouts de la piece de
bois sont ferrez avec des viroles qui y sont clouées, où l'on fiche des boulons. Ensuite à
droit & à gauche de chacun des bouts de la machine on plante des pieux qui sont liez en¬
semble par d'autres pieux mis en travers, où il y a des viroles de fer enchassées, dans les¬
I. UNE MA
RE DE LIMACE. Ce que Vitruv.
ou plutost une hotte à vin, en battant & serrant les oziers i
nomme icy Coch
ippelle vulgairement la vis d'Arch
les uns contre les autres. Aprés cela on poisse ces planche
mede. Il paroist qu'elle n'estoit pas encore attribuée à Ar
d'ozier dessus & dessous, & on couche des ais tout le lon
chimede du temps de Vitruve, bien que Diodore Sicilien
par dessus comme des douves de tonneau, que l'on banc
qui a écrit presqu'en mesme temps que Vitruve, l'en fasse
de cercles de fer. Il y a encore une autre maniere de faire
l'inventeur : mais l'usage celebre que cet Auteur donne à
cette vis, qui est de ne la point couvrir d'ais, mais de fair
cette machine dans son histoire, qui est d'avoir servy à ren¬
ement un canal en demi-rond avec ces ais qui demeure
'Egypte habitable, en épuisant les eaux dont elle estoi
nobile & scitué selon la pente que l'on veut donner à la
efois inondée, peut faire douter qu'elle ne fust beau-
vis: car cette vis tournant dans le canal auquel se rondeur
coup plus ancienne qu'Archimede.
est ajustée, pousse l'eau en haut de mesme que la vis d'Archi-
2. QUI A AUTANT DE DOITS D'EPAISSEUR.
mede, quoyqu'il s'en échappe quelque peu par les jointu-
l'est-à-dire qui a de long seize fois son épaisseur, parceque
res entre la vis & le canal: mais elle est plus aisée à remuer.
le pié des anciens avoit seize doits.
& plus facile à construire.
3. D'OSIER. Vitex, ainsi qu'il a déja esté remarqué
5. TOuTA-FAIT SEMBLABLES A CEUX QU
n'est pas proprement l'osier; mais on appelle osier en Fran
LON VOIT DANS LES COQUILLES DES LIMA¬
çois une plante semblable au saule, dont les rameaux fle
ONS. Le texte a faciunt justam cochleae mturalem- que
xibles sont propres à lier; & vitex n'a point de nom pro-
mitationem ; mais ces canaux ne sont semblables à ceux E
pre en François.
des coquilles des limaçons qu'en ce qu'ils soix en vis; & ils
4. DE LA MESME MANIERE. On se sert encore à
en sont differens, en ce qu'il y en a plusieurs, sçavoir jus
esent de la vis d'Archimede aux bâtimens qui se font dan
qu'à huit dans la vis que Vitruve décrit, zu lieu que le ca-
l'eau; mais la manière dont on fait les separations du de
nal des limaçons est unique. Quelques-uns estiment que la
dans, est bien plus facile que n'est ce collement de tringles
vis d'Archimede ne doit avoir en effet qu'un canal. Cardan
d'osier avec de la poix: on se sert bien d'ozier & de poix
veut qu'elle en ait trois; chacune de ces manieres a ses avan-
mais c'est autrement. On perce la piece de bois arondie
tages: la vis de Vitruve qui a huit canaux est pour élever
de trous fort prés à prés, & suivant les lignes spirales qui
une grande quantité d'eau ; mais elle ne scauroit l'élever si
y ont esté marquées par la methode que Vitruve pre
haut que celle qui n'en a qu'un; parce que cette derniere peul
& dans ces trous on fiche des bastons qui ont la lon
avoir son canal replié si prés-à-prés, que son obliquité per-
que l'on veut donner au dedans de la coquille. Dans ces ba-
met d'élever la vis beaucoup plus haut, que lorsque la mul
stons on entrelasse de l'ozier, comme pour faire un pannier,
titude des canaux rend leur position plus droite.
quelles