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Après avoir enduit le tout de poix, de même qu'on fait pour les navires, on
fait tourner la machine par des hommes qui la font aller avec les pieds (3), et
alors elle puise l'eau par les ouvertures qui sont à l'extrémité du tympan, et la
rend par les conduits des canaux qui sont le long de l'essieu. L'eau est alors recue
dans une auge de bois, elle coule en grande quantité par un tuyau qu'on y a
adapté, et est conduite dans les jardins que l'on veut arroser, ou dans les salines
où l'on fait le sel.
Si l'on veut élever l'eau plus haut que l'essieu du tympan, il y a peu de chose
à changer à la machine. Il faut faire autour de l'essieu une roue assez grande
pour atteindre à la hauteur où l'on veut élever l'eau, et autour de la circonfé¬
rence de la roue attacher des caisses de bois (4) enduites de poix et de cire; on
fait tourner cette roue par des hommes qui marchent dedans, et, par ce moyen,
les caisses remplies d'eau seront élevées jusqu'au réservoir placé en haut, où elles
verseront d'elles-mêmes, en se retournant, l'eau qu'elles contiennent, ayant alors
leur ouverture retournée par le bas (5).
Si l'on a besoin d'élever l'eau encore plus haut, il n'y a qu'à mettre sur l'essieu
d'une roue (6) une double chaîne de fer qui descende jusque dans l'eau, et atta-
tres endroits où il ne s'agissait pas, comme en ce cha¬
pitre, de plonger dans l'eau. Saumaise y a regardé de
plus près; il dit : Tignorum cubilia latinis columbaria
dicuntur, teste Vitruvio.
(3) J. Martin traduit hominibus caleantibus versatur,
par le mouvement d'aucuns hommes qui cheminent de¬
dans. Mais cette interprétation ne saurait convenir à
la chose, si l'on ne l'explique autrement, parce que
ce dedans s'entend du tympan qui puise l'eau, dans
lequel les hommes ne sauraient cheminer, et ainsi il
faut supposer qu'il y a une autre roue jointe au tym¬
pan, dans laquelle des hommes marchent comme dans
celle d'une grue, ainsi qu'il est représenté dans la
première figure de la planche LXXXVI.
(4) Le mot de Modiolus n'est pas moins ambigu que
celui de Tympanum: car il signifie des corps de pompe
dans la machine hydraulique, et, dans la pompe de
Ctesibius, des barillets; dans le chapiteau de la cata-
pulte et ici, ce sont de petits coffres ou de petite¬
caisses. On pourrait leur donner un nom qui convien
drait à tous ces usages, en les appelant des boîtes
comme a fait Héron, qui appelle pyxidas les corps de
pompes. Le mot quadrati, que Vitruve a ajouté à mo¬
VITRUVE,
dioli, m'a déterminé à leur donner le nom de caisse,
qui, dans le plus commun usage, est une espèce de
coffre carré, quoique quelquefois la caisse soit ronde
comme dans les tambours de guerre.
(5) Il n'est point vrai qu'un chapelet mis sur l'es¬
sieu d'une roue élève l'eau plus haut que les caisses
qui sont autour de la circonférence de la roue, de
sorte qu'il faut entendre que ce chapelet est sur l'es¬
sieu d'une roue élevé fort haut, et que l'on fait aller
à bras, ainsi qu'il est représenté dans la troisième fi¬
gure de la planche LXXXVI; ou avec un cheval, et
non pas avec le courant de l'eau.
(6) Pour traduire à la lettre, il aurait fallu dire
qu'il faut sur l'essieu une double chaîne qui y soit
entortillée, ce qui n'aurait point eu de sens, parce que
cela aurait signifié que cette chaîne doit être entor¬
tillée de même que la corde l'est autour du moulinet;
et la vérité est que cette chaîne n'est point entortil¬
lée, mais seulement posée sur l'essieu, ainsi que la
corde l'est sur la poulie d'un puits ; il faut seule¬
ment remarquer qu'il est nécessaire que cet essieu
soit à pans, afin que la chaîne ne puisse glisser, et
qu'elle suive toujours le mouvement de l'essieu: car