LIVRE IV.
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l'Entablement : sur les forces on met les Pannes et enfin les Chevrons (1) qui
sont sous les tuiles, et qui avancent aussi loin qu'il est nécessaire pour mettre
les murailles à l'abri.
C'est ainsi que chaque chose, dans les édifices, doit être mise par ordre, en
sa place, selon son espèce; et c'est à l'imitation de cet assemblage de plusieurs
pièces de bois dont les charpentiers font les maisons ordinaires, que les archi¬
tectes ont inventé la disposition de toutes les parties qui composent les grands
bâtiments de pierre et de marbre (4).
La méthode que les ouvriers ont suivie de tout tems est, qu'ayant posé leurs
poutres sur les murs, de telle sorte que du dedans du mur elles passaient jusqu'au
dehors, ils remplissaient de maçonnerie les espaces qui sont entre chaque
poutre (2) pour soutenir la corniche et le toit qu’ils embellissaient de ce qu'il
y a de plus délicat dans leur art : après cela le bout des poutres, qui sortait hors
le mur, était coupé à plomb, et comme cela ne produisait pas, selon eux, un
PLANCHE XXIV.
(A) La première figure représente le système de charpente pour toiture que Vitruve appelle
Tecta ubi majora spatia sunt.
La figure deuxième représente le système de charpente pour toiture que Vitruve appelle Tecta
commoda.
Ces deux figures se rapportent aux notes de Perrault, chap. II, pages 151 et 152.
représentent des bouts de chevrons, il faut entendre
que cela est dit conformément à l'idée que l'on a de nos
toits, dans lesquels les chevrons sont seuls capables de
sortir de l'entablement.
Pour ce qui est de l'objection qu'on peut faire , sa¬
voir : que les modillons sont trop rapprochés pour re¬
présenter les forces qui sont beaucoup plus espacées
que les chevrons, la réponse est qu'il ne s'agit pas de
cette proportion, mais d'attribuer aux parties qui
comme les modillons et les denticules , font des saillies
dans la corniche, les pièces de bois qui peuvent faire
ces saillies en descendant de la couverture. Or, n'y
ayant que les forces et les chevrons qui puissent faire
ces sortes de saillies, il est certain que les forces com¬
parées aux chevrons ne peuvent représenter autre
chose que les modillons, et que les denticules, par
la même raison, doivent être pris pour le bout des che¬
vrons. Car, pour ce qui est du peu de rapport qu'il
TOME 1.
y a entre la fréquence des modillons et la rareté des
forces , le même inconvénient se trouverait aux trigly¬
phes qui ne laissent pas de représenter le bout des
poutres, quoiqu’ils soient bien plus près que les poutres
qui ne portent que sur les colonnes, y ayant deux ou
quelquefois trois triglyphes entre chaque colonne. De
sorte qu'il faut concevoir que les modillons qui sont au
droit des colonnes sont les seuls qui représentent les
bouts des forces, et que ceux qui sont entre deux y
sont ajoutés pour la bienséance, de même que les
triglyphes.
(1) Asseres sont, à ce que dit Budée, ce qu’on
appelle en français des Membrures, qui sont des pièces
de bois refendues dela largeur de moins de quatre pouces
qui est proprement le bois qui sert à faire des chevrons:
(2) Ces espaces qui sont entre les poutres et qui
sont appelés Intertignia, sont appelés Métopes un
peu après.
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